Albert Eylenbosch, figure emblématique de la politique saint-gilloise, a présidé le CPAS de Saint-Gilles pendant un quart de siècle (1971-1995). Passionné par la richesse culturelle de la commune, Eylenbosch créa avec l’Échevin de la Culture et de l’Enseignement Alain Hutchinson, sur demande du bourgmestre de l’époque Charles Picqué, l’ASBL «Les Rencontres Saint-Gilloises ». Fut également en charge de l’institution, la conseillère communale Silvana Pavone. En 1988, ils proposèrent alors l’évènement « Parcours d’Artistes », malgré les réactions sceptiques. Cependant, Charles Picqué parraine l’idée et cet évènement connu un succès total.
[Journal Le Drapeau Rouge, 1988, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
Pour une commune comme Saint-Gilles, il s’agissait de mettre en évidence les ressources et potentialités créatrices dans la cité, plutôt que d’insister sur les difficultés diverses inhérentes à une population hétérogène, économiquement faible et socialement défavorisée. Ainsi, la première réalisation du Parcours d’Artistes, du 27 mai au 12 juin 1988, a été un évènement tant pour la population saint-gilloise que pour les artistes créateurs qui y ont participé. Le projet était centré sur l’ouverture au grand public de près de 100 ateliers d’artistes résidant ou travaillant à Saint-Gilles. Celui-ci a été également complété par l’intégration de près de 30 galeries d’art existantes sur le territoire de la commune. Vincent Van Gogh disait en parlant de Saint-Gilles à son frère Théo : « Il y a de ces lieux, comme il y en a heureusement partout, où l’on se sent chez soi plus qu’ailleurs. »
Certains lieux sont privilégiés, comme ceux qui ont un pouvoir sur les hommes et sur les objets ; il en est ainsi du charme discret de certaines villes de Provence, du ciel gris d’Honfleur, de canaux perdus à Bruges. Saint-Gilles est une rencontre, toujours inattendue. C’est le sentiment qu’Albert Eylenbosch voulait essayer, durant quelques week-ends, de partager avec tous. Pour découvrir tout à la fois des galeries, des ateliers et des écoles d’art qui se sont inscrits dans l’histoire même de la commune. En effet, pendant trois week-ends, plus de 200 artistes, peintres, sculpteurs, photographes, graphistes, dessinateurs, architectes, stylistes, etc. qui vivaient ou travaillaient à la commune, ont ouvert leurs ateliers et présenté leurs créations. Certains ont conçu des travaux spécialement pour cet événement et nombreux ont été ceux qui invitaient des artistes résidants ailleurs qu’à Saint-Gilles. Les associations sociales et culturelles privées et publiques ont contribué à accueillir des artistes saint-gillois en manque d’espaces de travail, à organiser des ateliers créatifs et des programmes culturels.
Les principales galeries d’art contemporain associées à ce projet, ont proposé des expositions invitant des plasticiens de renommée internationale et des jeunes créateurs. Par ailleurs, divers créateurs choisis par l’ASBL ont conçu pour l’occasion des œuvres de grand format, placées aux carrefours et aux places de la commune pendant les trois week-ends, et réalisé des performances visuelles dans les parcs et sur les places publiques.
Cette action de promotion des arts plastiques a permis à près de 10.000 personnes recensées, venant de tout le pays, comme de pays tels que la France et les Pays-Bas, de découvrir des nouveaux lieux, à travers une cinquantaine de rues à parcourir. Elles y ont découvert des créateurs inconnus, redécouvert des créateurs mal connus et des jeunes talents. Chaque artiste a reçu la visite de 300 à 1000 personnes sur les neuf journées qu’ont duré le Parcours. Nombreux parmi eux ont annoncé la vente de plusieurs de leurs œuvres et l’obtention de contrats avec des galeries.
Lors de cette première édition, le « Parcours d’Artistes » a proposé une grande diversité de tons et de styles d’art conceptuel. Suite à la réussite du projet, une deuxième édition a eu lieu du 4 mai au 20 mai 1990 pour rendre hommage à l’Art nouveau où toute une tradition de salons artistiques à marquée le passage du XIXe au XXe siècles et a permis la réalisation d’un des hôtels de ville les plus marquants du pays. En effet, le centre d’accueil de ces évènements était l’Hôtel de Ville de la commune, édifice qui symbolisait la prospérité de Saint-Gilles, décoré par l’architecte Albert Dumont et le maître sculpteur Julien Dillens. Plus de 35 artistes ont collaboré à cette œuvre qui continue encore aujourd’hui a étonné tous ceux qui la visitent. Parmi eux : Alfred Cluysenaar, Jean-Baptiste De Keyser, Joseph Lambeaux, Fernand Khnopff, Jean-Pierre Braecke etc.
[Affiche promotionnelle de l’évènement, 1990, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
[Badge d’entrée au Parcours d’Artistes II, 1990, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
[Carte du Parcours d’Artistes II, 1990, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
Tandis que la première édition se passe sans polémique, la deuxième reçoit le nom d’évènement médiatique car sous un plafond peint par Khnopff, une exposition de Jef Lambeaux se trouve au cœur de l’Hôtel de Ville. Le temps de Saint-Gilles de se réconcilier avec le très sulfureux Jef Lambeaux était venu, confiait Eylenbosch à la presse.
[Article de presse consacré à l’exposition de Jef Lambeaux, Journal du Crédit communal, 1990, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
Jef Lambeaux a vécu longtemps à Saint-Gilles (1881-1908). Il a installé son atelier à la Hollestraat, puis rue du Tyrol (actuelle rue Antoine Bréart). Il s’agissait de célébrer les retrouvailles et la réconciliation de la commune et du sculpteur dont la façon sensuelle de sculpter le nu a fait l’objet de critiques à l’époque. Son œuvre majeure, « Les passions humaines » réalisé en 1890 et commandé par Leopold II, était considéré comme une représentation d’exhibitionnisme par les dévots. Lambeaux n’était pas le seul avoir eu une forme de reconnaissance à Saint-Gilles. Eylenbosch, à la tête des « Rencontres Saint-Gilloises », a en effet organisé à la l’Hôtel de ville ou au Centre culturel Jacques Franck de nombreuses expositions en hommage aux artistes qui ont collaboré à la décoration de l’Hôtel de Ville (Joseph Dillens, Pierre Paulus, Léopold Speeckaert, Alfred Cluysenaar et sa famille, etc), et ainsi que certains aspects importants de la commune (histoire, action sociale, police communale, vie politique, etc.).
[Ouvrages rédigés par Albert Eylenbosch à l’occasion des expositions, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
[Affiches conçues pour les expositions à Saint-Gilles,1994-1996, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
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