Le docteur Jean-Baptiste Jourdan (1803-1878) fut médecin et philanthrope. Il a effectué ses études de médecine à l’Université catholique de Louvain. Propriétaire terrien et promoteur compétent, c’est avec Jean-Philippe De Joncker qu’il devint l’un des fondateurs de la première rénovation du quartier Louise et de la place Stéphanie après le démantèlement de la seconde enceinte de Bruxelles. Une place et une rue ont été baptisées en son honneur à Saint-Gilles et à Etterbeek. Il entra en fonction en tant que conseiller communal de Saint-Gilles le 1er janvier 1858 et demeura en poste jusqu’à son décès. De plus, il assuma les responsabilités d’échevin communal de 1861 à 1871.
Le 3 août 1869, il est nommé président de la Commission des hospices civils de Saint-Gilles. Le docteur Jourdan mieux que personne n’avait pu se rendre compte, par l’exercice de sa profession, de la triste situation matérielle de la grande masse de la population de Saint-Gilles. Le sort des vieilles personnes, démunies de tout, l’impressionna particulièrement. La Commission des Hospices était en charge des personnes âgées de la commune, en particulier celles hébergées à la rue de Munich (actuellement rue d’Andenne), où, à l’époque, elle disposait de locaux fort insuffisants.

[PV de la séance du 10 septembre de 1869 des Hospices civils de Saint-Gilles, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
Jourdan songea à un nouvel établissement et, par acte notarié en date du 10 septembre 1869, il fit don à la commune de Saint-Gilles d’une somme de 20.000 frs destinée à l’acquisition d’un terrain.
À son décès en 1878, une partie de sa fortune fut léguée aux communes de Saint-Gilles, Koekelberg et Etterbeek, à charge pour elles d’édifier, sur leur territoire respectif, des hospices-hôpitaux destinés aux personnes âgées démunies, aux malades, aux infirmes et à d’autres infortunés, sans distinction de culte, de privilège ou de préférence. À Saint-Gilles, des terrains étaient disponibles en face de la prison, près de la Hollestraat, aujourd’hui disparue.


[Home Jourdan, vers 1956, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
Le don de 20.000 frs a permis l’acquisition d’une partie du terrain, la commune a offert le complément nécessaire. En 1891, treize ans après le décès du Dr Jourdan, le home portant son nom a ouvert ses portes pour accueillir les premiers pensionnaires Saint-Gillois. Son coût total s’éleva à 455.156,49 frs, avec une capacité de 60 lits.
Pendant longtemps, les 60 lits du home Jourdan suffirent aux besoins de la population locale. L’accroissement de la population, un phénomène général certes, mais particulièrement accentué à Saint-Gilles, allait, au fil du temps, compromettre cette situation et la rendre bientôt franchement préoccupante.
Le vieil hospice, dont la capacité avait cependant été augmentée par un tour de force, passant de 60 à 90 lits, fut irrémédiablement dépassé par les événements. Plusieurs centaines de personnes devaient être dirigées vers des homes situés souvent loin de Saint-Gilles, éloignés de tout ce qu’elles avaient connu tout au long de leur existence. Une solution radicale s’imposait ; il était devenu indispensable de faire du neuf.
En 1955, une commission d’études fut constituée sous la présidence de Jacques Franck, qui était à l’époque échevin délégué aux fonctions de Bourgmestre de Saint-Gilles. La Commission d’Assistance Publique saint-gilloise désigna alors l’architecte Gustave Pappaert pour mener à bien cette tâche. Les travaux furent entamés le 1er mars 1957, et le 15 juin 1957, Edmond Leburton, Ministre de la Santé publique et de la Famille, procéda solennellement à la pose de la première pierre des nouveaux bâtiments.


[Pose de la première pierre par le Ministre Edmond Leburton, 1957, Archives communales de Saint-Gilles]
L’aile dite « des conjoints » fut construite en premier lieu, et le 1er juillet 1959, les pensionnaires qui occupaient les anciens bâtiments furent transférés dans cette nouvelle aile. Quelques semaines plus tard, le vieil hospice Jourdan était entièrement rasé.
La construction du bâtiment central et de l’aile réservée aux personnes seules débuta immédiatement après. Les travaux furent achevés au début de 1962, et fin septembre, le successeur de l’hospice Jourdan, désormais appelé le home « Les Tilleuls », put accueillir ses nouveaux pensionnaires dans des conditions de confort parfaites.
Le home « Les Tilleuls » a été officiellement inauguré le 23 novembre 1963. L’ensemble des bâtiments du home ne laissait pas d’impressionner ceux qui les découvraient pour la première fois. La capacité de cette maison de retraite modèle était de 258 lits, répartis comme suit : dames seules (63 lits), messieurs seuls (39 lits), semi-valides (72 lits), 30 appartements pour conjoints (60 lits) et une infirmerie pour les malades légers (24 lits). Il convient d’ajouter un appartement pour la directrice, 12 chambres destinées au personnel, ainsi que les locaux de séjour et de cuisine qui leur sont dédiés, ainsi qu’un logement familial pour le concierge.

[Résidence « Les Tilleuls », 1963, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
Le home est érigé sur un terrain d’une superficie d’environ 76 ares, délimité par trois artères, dont la principale est l’avenue Ducpétiaux. L’implantation des bâtiments a été étudiée de manière à créer une certaine transparence, permettant ainsi, depuis la rue Diderich, la visibilité des constructions le long de l’avenue Ducpétiaux.
La résidence « Les Tilleuls », relève encore actuellement de la responsabilité du prédécesseur légal des hospices, à savoir le CPAS de Saint-Gilles. Ainsi, en 2019, le CPAS a initié des travaux de rénovation visant à redonner toute sa splendeur à cette institution emblématique de la commune.


[Plaquette conçue lors de l’inauguration et résultats de la première phase des travaux à la résidence « Les Tilleuls »,2019-2023, Archives du CPAS de Saint-Gilles]
Comme le dit le proverbe : « Une petite aide fait grand bien ». Le docteur Jourdan a généreusement contribué par d’importants dons à la construction d’hospices et de crèches visant à soutenir les publics fragiles en Belgique, en particulier dans les trois communes qui sont devenues ses légataires universelles : Saint-Gilles, Koekelberg et Etterbeek. En 1874, il a fait un don financier à la ville de Louvain, sa cité universitaire, en vue de la création d’une crèche avec une école maternelle, venant ainsi compléter celles des trois communes mentionnées précédemment. En échange, ses légataires sont responsables de l’entretien de son tombeau et de celui de sa sœur.
Sources:
- Archives du CPAS de Saint-Gilles
- Archives communales de Saint-Gilles.
- Personnes célèbres : Dr Jean-Baptiste Jourdan
- https://lirias.kuleuven.be/retrieve/644169, notice « Résidence Jourdan à Louvain » par Hoornaert et H. Geert Van, version en français de Sels P., 2020.
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